Débat attirant bien des réactions, autant extrêmement positives et extrêmement négatives, j’ai décidé d’analyser la question.
Validité du débat
Une partie de mes recherches a été de demander l’avis de différents acteurs du milieu. Un commentaire qui est revenu souvent fut de mettre en question la légitimité d’un tel débat : « Pourquoi est-ce qu’on s’obstine à savoir si c’est du vrai sport ou non? On s’en fout, ça ne change rien. »
Je vais tout d’abord répondre à cette question. Savoir si le e-sport est du vrai sport ou non est EXTRÊMEMENT important! Je ne vais pas couvrir tous les points couvrant mon affirmation mais en voici deux :
– Soutien gouvernemental : Les sports n’ont pas les mêmes reconnaissances et les mêmes avantages que les loisirs en général. Nous pouvons parler de crédibilité, mais aussi de subventions et de programmes gouvernementaux différents. Dans les universités, par exemple, il y a d’énormes différences entre une association étudiante et une association étudiante sportive.
– Statut juridique des athlètes : Dans bien des pays, les athlètes professionnels ont un statut particulier, au même titre qu’un travailleur autonome, par exemple. C’est ce type de statut qui aide un athlète étranger à demander un visa d’athlète lorsqu’il veut participer à un tournoi majeur ayant lieu dans un autre pays.
Différents arguments pour et contre ainsi que mon contre-argument
POUR – L’argument de type « Le e-sport a des cotes d’écoute dépassant beaucoup de sports traditionnels » ou « Le e-sport remplit des stades ».
La popularité d’un événement ne détermine pas si c’est du vrai sport ou pas. Game of Throne et Céline Dion ne sont pas des sports.
CONTRE – L’argument de type « Le e-sport est juste un jeu vidéo » ou « Le monde joue sur internet ».
L’e-sport est effectivement basé sur un jeu vidéo. Cependant, même si ce que nous voyons le plus souvent est le « gameplay » d’un monde virtuel, ce qui détermine si la personne est bonne ou non est bel et bien dans le monde réel. Les avatars dans les jeux sont contrôlés et réagissent à des commandes données en temps réel par des joueurs.
POUR – L’argument de type « D’autres pays ont reconnu le e-sports » ou « Ailleurs , ils le font ».
Peu importe ce qui ce passe ailleurs, le fait qu’un pays permette quelque chose n’est, et ne sera jamais, un gage que c’est bien. On ne veut pas de la peine de mort au Québec ni que les femmes ne puissent plus sortir de leurs maisons seules.
CONTRE – L’argument de type « Tu ne perds pas du poids en jouant à des jeux vidéo » ou «Tu ne te mets pas en forme en faisant ça ».
Effectivement, le e-sport fait partie de la catégorie d’activité, avec le tir et les billards, où l’athlète doit complémenter son entraînement avec d’autres activités cardio-vasculaires. D’ailleurs, tous les sports le font à un degré différent.
Mon opinion
Pour savoir si le e-sport est un sport ou pas, il est important de déterminer qu’est-ce qu’un sport. Ouvrons alors le Larousse et vérifions :
Sport – Ensemble des exercices physiques se présentant sous forme de jeux individuels ou collectifs, donnant généralement lieu à compétition, pratiqués en observant certaines règles précises.
Allons-y ensuite des différentes composantes de cette définition.
Ensemble des exercices physiques […]
Cette partie est de loin la plus controversée. Rappelons tout d’abord qu’il y a une énorme différence entre les sports contacts comme le football américain et les sports de cible comme les fléchettes. Les e-sports demandent une coordination œil-main, des réflexes et une précision hors-norme.
Exemple #1 : À Counter-Strike : Global Offensive, un jeu de tir à la première personne, lorsque deux joueurs professionnels se rencontrent face à face, la différence entre la victoire et la défaite se compte en millisecondes. La réaction aux stimuli visuels et la précision requise à un tel niveau demande des années de pratique et ce n’est pas tout le monde qui pourra y accéder.
Exemple #2 : À Starcraft 2, un jeu de stratégie en temps réel, les athlètes professionnels ont en moyenne un ratio d’actions par minutes (APM) d’environ 300, et ce, dans des parties pouvant durer plus de 45 minutes. Le niveau de multitâches de ces athlètes requiert une concentration et des aptitudes physiques particulières.
Lorsqu’on parle de blessures physiques, elles sont bien présentes dans les sports électroniques mais elles ne sont malheureusement pas encore bien prises en compte par les amateurs aspirant à devenir professionnels. Pour reprendre l’exemple de Starcraft 2, énormément de joueurs professionnels ont dû subir des opérations aux poignets pour pouvoir continuer leur carrière. Le syndrome du canal carpien est un exemple de problème récurrent. Les maux de dos liés à une mauvaise posture prolongée sont un autre exemple de blessures beaucoup trop communes. Voici pourquoi les équipes professionnelles sont suivies par des spécialistes comme des kinésiologues.
[…] se présentant sous forme de jeux individuels ou collectifs, […]
Les deux sont applicables.
[…] donnant généralement lieu à compétition, […]
Avec les gros tournois de plusieurs milliards en bourses, cette portion est couverte.
[…]pratiqués en observant certaines règles précises.
La plupart des règles sont intégrées dans le jeu directement mais il y a aussi une structure sur la composition des équipes, les formats des tournois, etc.
En conclusion, OUI le e-sport est du vrai sport.
Maintenant, la suite du débat sera de déterminer quels jeux vidéo sont du e-sports. Car ce ne sont pas tous les jeux vidéo qui en sont.